mercredi 20 mars 2013

Viva la démocratie en Médéfie


Finalement, cette élection MEDEF est encore plus passionnante que dans mes espoirs les plus fous. Que de rebondissements en perspective ! Car je vous rassure, rien ne s’arrêtera le 28 mars, mais ça, je vous expliquerai pourquoi dans un prochain post…

Pour l’instant, penchons-nous un peu sur le fameux texte transmis aux membres du Conseil Executif sur lequel ils doivent voter. Constatons tout d’abord que, conformément à l’esprit de transparence qui souffle dans la royaume du MEDEF, c’est… la presse qui a eu les primeurs de l’avis du comité Statutaire (celui-ci a été diffusé à l’issue du point de presse de La Reine, alors que les membres du CE ne l’avaient pas eu la veille). Eh oui, informer d’abord la presse avant ses instances de décision est le signe d’une démarche démocratique éclairée au sein du royaume. Euh, à propos, on n’avait pas dit qu’on n’utilisait pas les moyens du MEDEF pour faire sa campagne ? Ah, oui, suis-je gourdasse, on s’en fout. La Reine a toujours raison, donc la vérité change selon sa parole…

Alors, le texte :

Projet de résolutions à l’attention du Conseil exécutif du 28 mars 2013

Après avis du Comité statutaire et après débat au Conseil Exécutif, les modifications suivantes des statuts du Medef sont soumises au vote de l’Assemblée Générale Extraordinaire convoquée le [16 avril 2013].

Le décodage :

Pour mémoire, le Président du Comité statutaire, Georges Drouin, a passé la matinée précédent le Conseil Exécutif (donc le lundi 18 mars au matin) au service presse du Medef, et notamment avec le chef de ce service, pour préparer sa conférence de presse post-Conseil exécutif. Conférence convoquée dans l’après-midi en catastrophe pour faire croire que Georgie avait décidé de parler de manière impromptue à la presse. Et le principe de la Conf de Presse pour le Président du Comité Statutaire, ça a été validé par le CE ? Certain ? On peut vérifier dans le compte-rendu ? Le quoi ? Ah non, c’était une décision impromptue, prise sous le coup de l’émotion et répétée toute la journée…

Moralité : les résolutions étaient donc déjà largement connues de La Reine avant qu’elles ne soient présentées au Conseil exécutif (ce qu’elle a nié en Conseil).
Dans le même ordre d’idée, la convocation à une AG le 16 avril a été faite le matin du Conseil Exécutif – officiellement, il s’agissait de l’AG de validation des comptes. Tiens, il ne fallait pas attendre le Comité Exécutif ? Euh, tu ne veux pas non plus respecter les adhérents en plus ?


Résolution n°1 : MANDAT DU PRESIDENT (article 15 des statuts).

Exposé des motifs

Afin d’inscrire la présidence du MEDEF dans le temps long nécessaire à l’exercice de ses missions, il est proposé que le mandat à la Présidence du Medef soit d’une durée de 5 ans.
Afin de renforcer la dimension démocratique de l’élection à la Présidence du Medef, il est proposé de supprimer la possibilité d’un deuxième mandat plus court, actuellement prévu de 3 ans dans les statuts.
Désormais chaque mandat sera le résultat d’une véritable élection ouverte, équitable et transparente où l’Assemblée Générale seule sera souveraine.
Dans cette logique de souveraineté du corps électoral, toute personne satisfaisant aux conditions de l’article 16 et n’ayant pas atteint la limite d’âge pourra se présenter.

Modification proposée :

Remplacer l’article 15 actuellement rédigé comme suit :

« ARTICLE 15 - DURÉE DU MANDAT ET RENOUVELLEMENT

Le Président du MEDEF est élu pour cinq ans par l'Assemblée Générale. Son mandat peut être renouvelé une seule fois pour une durée de trois ans. »,

par la nouvelle rédaction suivante :

« ARTICLE 15 - DURÉE DU MANDAT

Le Président du MEDEF est élu pour cinq ans par l'Assemblée Générale. »            


Le décodage :

Cette résolution permettrait donc à Laurence Parisot de se représenter pour un troisième mandat de 5 ans (ce que les statuts actuels ne permettent pas), après un mandat de 5 ans (2005-2010) puis un autre de 3 ans (2010-2013). Evidemment, d’autres seront encore possibles, puisque le renouvellement est désormais illimité. C’est commode de changer les statuts à quelques semaine de l’élection et de s’appliquer les changements.

J’en profite pour suggérer à la presse, plutôt que de gober ce que dit Georgie et la Reine, de lire un peu l’avis du comité Statutaire et surtout les statuts du MEDEF. On peut lire en effet dans l’avis (p10) que le Comité ne retient pas la notion de prolongation ou de renouvellement de mandat tel que cela avait été aménagé en 1978. De même, Georgie a dit partout que les statuts devaient être renouvelés puisqu’ils dataient de… 1946. Euh, problème, quand on télécharge sur le site du MEDEF les statuts, on s’aperçoit que les statuts datent de… 1998. Ceux qui datent de 1946 étaient ceux du CNPF qui n’existe plus, et en 1998, les statuts ont été revus complètement pour donner naissance au MEDEF. Ne pas savoir de quand datent les statuts sur lesquels on travaille, c’est normal pour un président de Comité Statutaire ? Pour Georgie, oui, visiblement…

Résolution n°2 : LIMITE D’AGE DES CANDIDATS A LA PRESIDENCE (article 16 des statuts)

Exposé des motifs

Afin de prendre en compte l’allongement de l’espérance de vie, il est proposé de porter la limite d’âge, au jour de l’élection, de 65 ans actuellement à 67 ans.

Modification proposée :

Au sein de la première phrase du premier alinéa de l’article 16 actuellement rédigée comme suit :

« ARTICLE 16 - CANDIDATURES

Les candidats à la présidence ne doivent pas être âgés de plus de 65 ans au jour de l’élection. », remplacer « 65 ans » par « 67 ans ».            

Le décodage :

Cela ne change rien pour Laurence Parisot pour l’instant. Cela dit, elle avait annoncé que c’était une question dont elle allait se saisir. Un deal avec un des candidats en vue ??

Résolution n° 3 : ACCOMPAGNEMENT DU NOUVEAU PRESIDENT (article 17 des statuts)

Exposé des motifs

Afin d’améliorer l’efficacité et la continuité de l’exercice de la fonction de Président, il est proposé qu’un temps d’accompagnement permettant la pleine connaissance du Medef et de son environnement soit organisé au bénéfice du nouveau Président élu. Durant une période et selon des modalités définies au règlement intérieur, le nouveau Président élu participerait au Bureau et au Conseil exécutif.

Modification proposée

Ajouter un troisième alinéa à l’article 17 – ELECTIONS :

« La date de l’élection est fixée pour permettre un accompagnement du nouveau Président élu avant sa prise de fonction à l’issue du mandat du Président sortant, selon une période et des modalités définies au règlement intérieur. »

Le décodage :

Curieux ? Non, simple formalité de précaution. Comme rien n’est certain en ce bas monde, il faut envisager de perdre l’élection (l’horreur), même si on arrive à modifier les statuts. Avec cette résolution, la Reine peut rester La Reine encore quelques mois. Car quoi ? Supposons que le Règlement Intérieur propose une période de 6 mois de recouvrement, ce qui semble acceptable. L’élection a lieu en juillet et la Reine perd (inimaginable !). Pas grave, elle pourra se maintenir 6 mois de plus, juste histoire de pourrir la vie de son successeur et d’essayer de montrer que le nouveau est vraiment trop nul et qu’il faut la maintenir. Astuce : le règlement intérieur ne précise pas à ce jour ces éléments, il conviendra donc le modifier également. Et qui en a la responsabilité ? Le Comité statutaire très indépendant (et fin connaisseur des statuts comme on l’a vu) évoqué précédemment… Le tuilage risque de durer 5 ans…

Enfin, outre la question de la période (a-t-on besoin de se faire tenir la main lorsque l’on est président du Medef ?), la question des modalités est tout à fait savoureuse : qui préside réellement ? Qui est le porte-parole ? Qui occupe le bureau du 7ème étage et rencontre le Président de la République et le Premier Ministre ? Autant de belles empoignades en perspective… Le patronat va être apaisé…

Résolution n° 4 : AUTRE MODIFICATION STATUTAIRE (article 13 des statuts)

Exposé des motifs

Afin de renforcer le caractère démocratique du fonctionnement du MEDEF, il est proposé qu’au Conseil Exécutif, soit proposé de droit, au sein du collège des 10 personnalités, tout candidat ayant recueilli plus de 15 % des suffrages exprimés au 1er tour de l’élection du Président.

Modification proposée

Remplacer le troisième point du premier alinéa de l’article 13 actuellement rédigé comme suit :

« ARTICLE 13 - COMPOSITION, DÉSIGNATION, VACANCE

Le Conseil Exécutif comprend au plus 45 membres :

• le Président élu du MEDEF qui préside les séances,

• 34 membres élus parmi les délégués à l'Assemblée Générale des organisations membres actifs du MEDEF, à la majorité absolue des membres de l'Assemblée ayant pris part au vote personnellement ou par mandataire, selon des modalités fixées par le règlement intérieur :
- 22 membres au titre des organisations professionnelles,
- 12 membres au titre des organisations territoriales,

• 10 personnalités, au plus, élues à la majorité absolue des membres de l'Assemblée Générale ayant pris part au vote personnellement ou par mandataire, sur proposition du Président dont 5 après consultation du Conseil Exécutif. Elles doivent faire partie de l'un des groupements membres actifs de l'organisation. Leur élection au Conseil Exécutif entraîne ipso facto leur participation à l'Assemblée Générale avec voix délibérative et à l'Assemblée Permanente. »,

par la rédaction suivante :

« • 10 personnalités, au plus, élues à la majorité absolue des membres de l'Assemblée Générale ayant pris part au vote personnellement ou par mandataire, sur proposition du Président dont 5 après consultation du Conseil Exécutif. Les candidats à l’élection du Président ayant recueilli plus de 15 % des suffrages exprimés au 1er tour de l’élection figurent de droit parmi ces 10 personnalités proposées. Les autres doivent faire partie de l'un des groupements membres actifs de l'organisation. Leur élection au Conseil Exécutif entraîne ipso facto leur participation à l'Assemblée Générale avec voix délibérative et à l'Assemblée Permanente.»

Le décodage :

Formidable ! Simple précaution également – il faut envisager l’inenvisageable (perdre). Mais là, il suffit de faire plus de 15% (ce qui apparaît une formalité pour la Reine) pour se maintenir au Conseil exécutif, alors qu’elle ne préside ni une fédération ni un Medef territorial. En plus, c’est l’appât pour les candidats qui ne sont pas au CE (Volot, Lanxade, Lambel) et qui ont peu de chance d’être élus : si vous soutenez ma réforme, je vous donne une chance de rentrer au CE. Merveilleux ! (ca semble marcher avec Lambel dont les tweet deviennent pro parisot) En quoi, ce truc est démocratique ? Mystère ! C’est surtout la certitude d’avoir une multiplication de candidats qui vont espérer obtenir plus de 15%.

Cerise sur le gâteau, ce qui est dans l’avis du Comité Statutaire, mais n’est pas soumis au vote du CE (on se demande bien pourquoi), est lié, à cet article : il s’agit de la modification de l’article 9 du Règlement Intérieur qui indique les modalités de représentations lors de l’AG (et en particulier les mandats).  L’avis du CS propose de « limiter les votes mandatés à 5 mandats par porteur à l’occasion des AG. » Et alors ? Simple : quand une Fédération possède plus de 5 votes, par exemple, au hasard l’UIMM (qui a plus de 30 voix), elle devra avoir au moins 7 mandataires dans la salle pour porter les voix. Autant d’occasion de permettre une dispersion des votes alors qu’aujourd’hui, une seule personne peut porter l’ensemble des votes et aller dans le même sens. En faisant cela, mine de rien, la Reine morcelle le pouvoir des plus grosses fédérations et rend plus difficile le vote en bloc. Evidemment, ça, on n’en parle pas en CE et rien n’est indiqué dans les projets de résolution, mais si c’est voté, le Comité Statutaire va le réintroduire dans le Règlement Intérieur en disant : « ben je l’avais dit dans l’avis, et vous l’avez voté… ». N’oublions pas que l’avis du Comité Statutaire, le Conseil Executif ne l’a pas eu (seule la presse l’a reçu), et que le CE n’a eu que les projets de résolutions, donc une information partielle. Merveilleux, je vous dis.

BONUS :

Le vote du 28 mars se tiendrait pour l’instant à main levée, alors que le Conseil exécutif s’est mis d’accord Lundi pour un vote à bulletin secret. Et la justification de la Reine est : « Comme chacun doit porter les voix de sa Fédération, il n’y a pas de raison de se cacher… » Euh, oui, mais avec des raisonnements comme ça, on pourrait aussi tous voter aux élections présidentielles à main levé : chacun peut assumer son opinion non ?  Même dans les pires dictatures, on se contente de bourrer les urnes et on a laissé tomber les votes à main levé. Moi qui croyais que la démocratie était justement de donner la possibilité à chacun de s’exprimer sans avoir à subir de pressions…

Alors moi je dis, vu l’avis, la démarche de ces derniers jours et le délire de la Reine : si vous arrivez à voter à bulletin secret, les gars, vous avez intérêt à ne pas perdre  l’urne des yeux…

1 commentaire:

  1. Allez voir ce qui se passe dans le 93 et le Vaucluse... DEMOCRATIE... laissez nous rire !!

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